jeudi 28 mars 2013

Le Royaume-Uni s’implique dans le vrai changement alors que le Canada brasse les cartes


Le budget fédéral du Canada renfermait quelques surprises. Depuis plusieurs semaines, maintes discussions ont été tenues sur les moyens d’éliminer le déficit et de palier à la pénurie de compétences professionnelles. Cependant, pour ceux qui œuvrent en développement international, l’annonce que l’Agence canadienne de développement international (ACDI) deviendra une filiale du Ministère des Affaires étrangères et du Commerce international (MAECI) a frappé comme une onde de choc. Même les employés de l’ACDI ont révélé avoir appris la nouvelle la même journée que moi, par un tweet envoyé jeudi dernier par Evan Solomon de la SRC.

La nouvelle, si imprévue soit elle, n’est pas si mauvaise. Les ONGs canadiennes et les citoyens avertis ont longtemps revendiqué un ministère de premier plan pour la coopération internationale. Avec ce budget, notre souhait a été exaucé. Mais à quel prix? Le gouvernement dit que sa décision reflète « l’interrelation accrue entre notre politique étrangère, le développement et nos objectifs commerciaux ». Depuis plusieurs années, les gouvernements canadiens, les libéraux comme les conservateurs, ont tous proclamé la nécessité d’une plus grande cohérence au sein de la politique étrangère du Canada. Est-ce que l’absorption de l’ACDI par le MAECI marque le trépas d’un point de mire visant clairement l’éradication de la pauvreté? Est-ce que cet amalgame résultera en un programme de développement plus centré sur les intérêts de la politique étrangère canadienne et du commerce international?

Pas nécessairement. Carrefour soutien également les partenariats public-privé en mettant à profit les compétences de citoyens canadiens, et par des partenariats avec des acteurs du secteur privé. Cette année seulement, les torréfacteurs canadiens soutiendront plus de 180 familles caféicultrices boliviennes afin qu’ils puissent accéder au marché canadien. Le partenariat est avantageux pour toutes les parties prenantes, certes, mais le centre d’intérêt est d’offrir de réelles opportunités commerciales aux producteurs boliviens. Impliquer des acteurs du secteur privé peut s’avérer efficace, et oui, il y a des avantages pour les canadiens, mais en ce qui concerne mon fond de développement, je veux qu’il serve à ceux qui en ont le plus besoin.

Avec le déclin du soutien financier du Canada pour le développement, les estimations actuelles étant d’à peine 0,25 pour cent de notre produit national brute (PNB), nous devrions nous inspirer du Royaume-Uni. Ils ont démontré un leadership hors pair cette semaine alors qu’ils ont annoncé qu’ils allouer 0,7 pour cent de leur PNB afin d’éradiquer la pauvreté. Voilà qui rend le Royaume-Uni le premier de tous les pays du G8 à atteindre un objectif globalement accepté par les nations riches et initialement proposé par le Premier Ministre canadien Lester Pearson dans les années 60. Ceci a été réalisé malgré la menace d’une terrible récession et dans un contexte d’austérité budgétaire. Le Royaume-Uni sait que le développement global mènera vers une économie plus équilibrée et résiliente, et déclenchera un effet domino de progrès en santé, en éducation, en sécurité et en gouvernance.

Le Canada a déjà été chef de file en développement global; souvenez-vous, en 2008 lorsque notre gouvernement a été félicité pour ses efforts visant à délier l’entraide? Ça prenait du leadership. On a mis les besoins et les intérêts des pauvres à l’avant-plan. C’est le genre de leadership dont nous avons besoin. Notre argent a contribué à stimuler le développement économique afin que les gens puissent nourrir leur famille et envoyer leurs enfants à l’école. Des vies ont été sauvées grâce à un meilleur accès aux soins de santé. Cela a permis la capacitation des femmes, l’avancée des droits fondamentaux et a contribué à la bonne gouvernance partout autour du globe. Tout cela a fait une réelle différence dans des millions de vies et il est essentiel que notre stratégie à long terme, en ce qui concerne les fonds de développement, ne soit pas supplantée par des intérêts commerciaux et diplomatiques. En dépit des intérêts économiques domestiques, cet argent devrait être dédié à éradiquer l’extrême pauvreté, et nous ne pouvons perdre de vue cet objectif. Nous devons arrêter de brasser les cartes et commencer à induire de vrais changements.

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