lundi 23 novembre 2009

Un débat houleux

Alors que le soutien à une entente mondiale sur le changement climatique se glace, les Canadiens ont le devoir de raviver la flamme chez nos dirigeants

Récemment je
fus témoin d’un débat houleux sur le changement climatique.


Loin d'être un affrontement entre des scientifiques et des négationnistes du changement climatique, il s'agissait plutôt de militants écologistes et de spécialistes du développement qui débattaient de l'utilisation du terme « changement climatique » sur celui de « réchauffement climatique ». C'était une guerre des mots, les deux parties souhaitaient, autant l'une que l'autre, s'assurer que les Canadiens et les Canadiennes comprennent le péril auquel nous sommes tous confrontés, en espérant que les mots justes sauraient inspirer les citoyens à passer à l'action.


De par mon travail, je sais que le danger est bien réel. Au cours de mes huit années avec Carrefour canadien international (CCI), j'ai été témoin de l'impact des sècheresses et des inondations sur les partenaires du Sud et les collectivités qu'ils desservent.

Au Swaziland, beaucoup connaissent la famine. Près de la moitié de la population est dépendante de l'
Aide alimentaire. Soixante-dix pour cent de la population travaillent dans l'agriculture de subsistance et la production alimentaire n'a cessé de diminuer tout au long de la décennie. L'irrégularité des conditions climatiques, l'appauvrissement des sols, et la sècheresse demeurent un problème aujourd'hui, et le seront demain encore.

Le Niger, lui aussi,
connait l’insécurité alimentaire en raison de pluies irrégulières et imprévisibles, un phénomène qui n’a fait que d’empirer ces dernières années. Certaines solutions existent, CCI appuie, par exemple, le travail des partenaires locaux qui tentent de garantir la sécurité alimentaire et d’augmenter les revenus des agriculteurs de subsistance grâce à des stratégies d'adaptation telles que la création de banques de céréalières communautaires. Les femmes comme Fati Hassan en récoltent les bénéfices. « Avant, c'est nous, les femmes, qui avions l'habitude de voyager,  qui devions parcourir jusqu'à neuf kilomètres pour trouver de la nourriture. Maintenant la nourriture est à portée de mains. »


Au Niger et au Swaziland, comme dans de nombreux pays pauvres, les femmes sont touchées de manière disproportionnée. Sur la planète, les femmes produisent jusqu'à 90 pour cent de l'alimentation dans les milieux ruraux défavorisés. Elles vont chercher la nourriture, travaillent la terre, et marchent de longues distances pour se ravitailler en eau et en autres denrées de base. Pourtant, en raison de leur pauvreté, elles sont aussi plus à risque de vivre la violence et d'être infectées par le sida, le choléra ou le paludisme. Les femmes sont responsables de l'entretien et de la préservation de terrain, mais exercent peu de contrôle sur l'exploitation des ressources naturelles et, dans de nombreux pays, il leurs est interdit d’accéder à la propriété.


Je pourrais donner encore d’autres exemples. Lors de récentes entrevues avec des partenaires du Sud, chaque partenaire, quel que soit son secteur d'intervention, a soulevé la question du changement climatique comme un défi majeur. Pourtant, les communautés défavorisées dans le monde ne portent que peu de responsabilités quant à la dégradation de l'environnement causée par les émissions de carbone, mais, pourtant,  ce sont elles qui sont le plus durement touchées. De plus, si l'on ajoute à cela la crise alimentaire et économique actuelle, le changement climatique menace d'effacer des décennies de développement économique.

À Carrefour, notre spécialité, c'est la réduction de la pauvreté. Nous travaillons avec des partenaires locaux pour accroitre leur résilience et leur capacité à s'adapter. Nous soutenons les producteurs ruraux. Et nous augmentons la
participation des femmes au processus de prise de décisions dans les gouvernements et au sein de leur communauté. Nous ne sommes pas des experts en changements climatiques, mais nous savons que nous pouvons faire quelque chose pour inverser cette terrible tendance . Les enjeux sont bien trop importants pour rester tout simplement sur le banc de touche. Nous pouvons tous et toutes faire quelque chose.

Nous pouvons
commencer par changer notre propre comportement et nos habitudes de consommation au Canada pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Nous pouvons aussi soutenir les pays pauvres, touchés de manière disproportionnée, avec des subventions pour l'atténuation et l'adaptation. Nous pouvons insister pour une meilleure représentation politique des femmes et pour leur donner accès et le contrôle des ressources.

Mais a
vant tout cela, nous pouvons juste nous joindre aux autres et tirer la sonnette d'alarme. Alors que les journaux titrent que les chefs d'État ont abandonné des objectifs concrets pour le sommet de l'ONU de Copenhague, l'espoir s'estompe. Le temps est venu d'indiquer à nos dirigeants que nous exigeons plus d'eux.


Collaborer sur le plan international pour résoudre des problèmes globaux n'est pas chose facile. Nous comprenons. Mais la signature d'un accord qui est équitable, ambitieux et juridiquement contraignant est à notre portée.
Nos dirigeants doivent prendre la tête du sommet de Copenhague.